30/04/2011

Comme un boomerang, n°4, Montréal, Canada, 1987

A quoi reconnaît-on un zine québécois ? à la place qu'y occupe la défense de la francophonie, pardi ! De notre côté de l'Atlantique (enfin le vôtre, parce que moi en ce moment...), au milieu des années 80, le français, en tant que langue, ne s'est jamais senti réellement menacé par la déferlante anglophone - par les politiques si, cf. les lois sur les quotas de radiodiffusion, mais pour le pékin moyen, écouter du rock anglophone n'a jamais paru comme une brèche fendillant la langue de Molière -. De l'autre côté de l'Atlantique, où l'on pratique plutôt la langue de Corneille, c'est une tout autre histoire... et le terme "franco" (comprenez francophone) est un leitmotiv surprenant et parfois un brin tendancieux des textes publiés dans CUB : "Mais tabarnak, c'est sur le plancher de danse des discos que le combat doit être mené, au coude à coude contre toute la clique Italo-Judéo permanentée du samedi soir. C'est sur les ondes des grosses FM de Mtl, dans les clubs de rockers chic ou dans les bars alternatifs à-la-grattes-moi-le-cul qu'il faut concurrencer le monopole de la zizik British..." (page 4). 
L'histoire tumultueuse de "Louie Louie", de Richard Berry (non, pas lui) aux Kingsmen, est évoquée sur deux pages, ou comment un des classiques du rock'n'roll a failli tomber aux oubliettes.

The Kingsmen - Louie Louie by fredozydeco

Plus surprenant est l'article sur Kick, chanteur des proto-punks bordelais Strychnine, qui poursuivait là une carrière sous son propre nom de scène. Un peu plus tard, on retrouvera Kick et Loran des Bérus dans le duo Ze 6.
Ce numéro 4 sort peu après l'annulation de la tournée québécoise 1987 des dits Bérus, le contact du zine, Nicolas Bouchard, étant d'ailleurs le correspondant officiel de Bérurier Noir au Québec. Comme un boomerang était également doublé d'une émission radio du même nom sur (c)kut FM 90.3. Celle-là était spécialisée punk rock ska garage reggae oi! hip hop francophones... L'interview du quatuor féminin Vertical Pillows est la quintessence de la bonne interview qui fait sourire : de la retranscription sans tabou, aussi bien des déclarations des donzelles que de l'environnement (le Chinois qui passe commande, Fred qui renverse la table, etc.). On n'apprend pas grand chose, çà part dans tous les sens, mais on sent bien l'ambiance "backstage" fin de concert. Pur moment d'anthropologie zinesque!
Au chapitre "Coup de maître" de ce zine, notons que le n°3 (Décembre 1986) était accompagné du 45T "Radical hystery" des Thugs sorti chez Gougnaf Mouvement en janvier 1985.
Au sommaire également: The Godfathers, le "pépé" Iggy Pop, No Means No, le rock en Espagne, et un compte-rendu express des Chesterfield Kings.
Vous remarquerez dans le PDF l'absence de 4 pages (8, 10, 31, 33) résultant probablement d'une erreur d'impression (verso non imprimé), désolé je n'y peux rien et je n'ai pas poussé le vice à scanner les pages blanches, mais si quelqu'un peut m'envoyer les pages manquantes...
format 215x280 mm, 40 pages, NB
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21/04/2011

Rock Press, n°4, Toulouse, 1987

Rock Press est un drôle de fanzine, car dès le 1er numéro il apparaît comme une petite "entreprise" mûrement réfléchie: on ne lance pas un mensuel rock imprimé en offset sur un coup de tête... pourtant aucun des membres de l'équipe rédactionnelle n'avait d'expérience de presse professionnelle au préalable, tout juste l'animation d'une émission de radio sur FMR Toulouse. Les annonceurs et les mécènes locaux sont au rendez-vous dès le premier numéro (DRAC, Conseil Régional, Crédit Mutuel (!)...) qui est auto-financé, mais la subvention quinquennale "Jack Lang" offerte au Collectif d'Activités Musicales de Donneville assure une bonne partie du financement par la suite (au plus fort de son existence, Rock Press coûtait quand même autour de 160.000 FF par mois). Le réseau de distributeurs est essentiellement concentré sur le sud-ouest lors du lancement du n°1 en octobre 1986 (Aquitaine, Midi-Pyrénées + Paris), mais il devient quasi-national 6 mois plus tard (44 départements couverts). Le n°10 (juillet-août 1987) annonce d'ailleurs un passage aux NMPP pour la rentrée 1987. Deux numéros suivront et le 13, fatal, restera dans les cartons.
Dans ce numéro 4, comme dans les suivants, les styles traités sont nombreux et Rock Press offre une couverture exhaustive de l'actualité rock au sens le plus large possible : stars internationales (Ultravox, OMD), groupes britanniques émergents (The Pogues, The Woodentops), ou jeunes talents (Folamour, Died Pretty) se côtoient sans plus de discernement... les news s'attardent sur l'actualité des fanzines, les K7 compils de petits labels indés, etc.  Bref, c'est un objet éditorial étrange, tenant autant de Best ou Rock and Folk que du Abus Dangereux des débuts. Un prozine rock total en somme.
Il est par ailleurs assez remarquable qu'un tel zine ait compté parmi ses rédacteurs des activistes aux multiples facettes qui ont poursuivi pendant plusieurs décennies leur dévotion à la culture rock: le musicien Gill DoughertiFloréal Martorell fondateur du Collectif d'Activités Musicales puis d'un magazine rock en espéranto, Jean-François Vaissière rédacteur de Rock and Folk de 1986 à 2002 (un nouvel exemple du fanzine comme tremplin professionnel) et qui entame aujourd'hui une carrière de musicien folk-blues-country sous le pseudonyme Jefferson Noizet, Bernard Villeneuve devenu en 1991 le responsable du tourneur/producteur/label Willing Productions, ou encore le journaliste musical Philippe Astor.
Le n°1 (octobre 1986) a été scanné par la Fanzinothèque (PDF), on s'y attardera plus particulièrement sur la chronique des services minitel rock qui nous rappelle qu'internet existait en France dès les années 80... 
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Rock Press n°4, janvier 1987, format A4, 44 pages, impression offset

Merci à Philippe Astor et Flo Martorell pour les infos sur la création de Rock Press.

17/04/2011

Rock Ballad, n°1, Bordeaux, France, 1987

Autant le dire tout de suite, Rock Ballad couvre, dans ce numéro 1, un domaine du rock qui ne m'a jamais vraiment intéressé, à part Elliott Murphy et les Roadrunners. Little Bob, qu'on retrouve en interview, m'a toujours passablement agacé (il faut dire que lors d'une discussion avec lui, à la fin d'un concert à Nantes, nous n'étions pas parvenus à nous mettre d'accord - c'est un euphémisme - sur l'utilité du pogo lors d'un concert-rock). Mais c'est aussi en cela que ce prozine est intéressant et symptomatique des motivations des zineurs : l'absence de considération de la presse rock traditionnelle et des fanzines pour la pop-rock ou le country-rock en a été le moteur initial, et le créneau d'expression privilégié. Je ne peux m'empêcher de penser que Rock Ballad est aussi une sorte de réponse au fanzine mensuel (!) de la région toulousaine Rock Press: même format, même style d'impression, mais un plus grand mélange des genres pour ce dernier (j'y reviendrai). D'ailleurs, au moment même où Rock Ballad sortait ce premier numéro, Rock Press tentait de son côté le passage du côté obscur de la presse avec le lancement d'une formule distribuée par les fossoyeurs professionnels de la petite presse, les NMPP.
Côté rédacteur, il y a quand même du beau monde dans ce premier opus de Rock Ballad, José Ruiz notamment, qui est un ancien membre de Stilettos et surtout de Gamine dont il a composé la musique du 45T "Voyage". Il quittera le groupe juste avant le succès grand public de "Voilà les anges" (1987), mais restera jusqu'à ce jour un animateur de la presse rock nationale (collaborateur récurrent de Best) et bordelaise. 
format A4, 32 pages, impression offset.
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08/04/2011

Kiss The Blade, n°2, UK, 1987

Véritable zine de fans que ce Kiss The Blade puisque dédié - on pourrait dire dévoué - aux Caïn et Abel du goth: The Mission/The Sisters of Mercy. Sortie début 1987, il est un formidable témoignage (à travers une croustillante interview backstage de Hussey et Adams) sur les conditions de transition sisters/mission et l'émergence du nouveau groupe des deux rescapés sisteriens. Le fameux insert du tirage de tête du Reptile House EP est reproduit en poster central. On retrouve dans ce numéro des facs-similés des chroniques de Gods own medicine parues dans le NME et le Melody Maker (dont cette cinglante conclusion de David Quantick: "this album is inane and I shall sell it tomorrow"). Le fanzine est accompagné d'une cassette bourrée de morceaux "tombés du camion": des rushes de studios des Sisters (1984-85), leurs premiers concerts à Leeds et York (1981), une interview d'Andrew Eldritch sur une radio canadienne, les Janice Long Session de The Mission (1986), un morceau live des Skeletal Family + Eldritch, et 3 morceaux de James Ray... du bootleg de compétition pour l'époque!
28 pages, tirage : 250 ex numérotés à la main.


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06/04/2011

Yé-yé '84, Québec, novembre 1984

Une dizaine de rédacteurs dirigés par Richard Baillargeon élaborait ce fanzine mensuel dédié à la scène yé-yé québécoise, vingt ans après son apogée (on comptait près de 500 groupes au Québec dans les 60's). A la fois archiviste et média de niche faisant survivre et revivre ce courant issu du rock'n roll, Yé-yé est partagé entre rétrospective et actualités de la scène des "musiques d'agrément" du milieu des années 80. Un "poster" central bien sympa présente 5 formations disparues dont une courte biographie figure quelques pages plus tôt. Le fanzine sortait tous les 15 du mois et l'aventure s'est poursuivie jusqu'en 1989 avec le numéro 6 du volume 6 qui est annoncé comme l'ultime production (voir la chronique dans Inter: art actuel). Les numéros sont consultables à la Bibliothèque et les Archives du Canada.
Tirage de ce numéro 2 volume 2 : 300 ex.
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05/04/2011

Journalsong, n°5, Portland, Etats-Unis, 2002

Ce petit zine de 96 pages format A5 illustre ce que l'on appelle les "perzines", contraction de "personal fanzine". Il s'agit ni plus ni moins que d'un journal intime qui aurait perdu son côté secret puisque publié au grand jour. Rien de bien extraordinaire à l'heure des blogs sur tout et (surtout) n'importe quoi, mais une démarche plutôt originale il y a 10 ou 15 ans de cela. Le style littéraire de Journalsong est très US: phrases courtes, sèches, sans fioritures. Le style graphique quant à lui est un petit condensé de l'esprit DIY: la couverture est ainsi dessinée à la main (chaque exemplaire est donc unique!) au crayon de bois et de couleurs... 58 exemplaires pour ce n°5, 58 couv différentes... L'intérieur est également roots avec des textes tapés à la machine à écrire sur papier blanc, découpés et collés sur du papier à lignes puis photocopiés.
L'auteur, Steve Gevurtz, est un brin déphasé avec le monde qui l'entoure, il nous livre ses impressions, interrogations, agacements, et autres ras-le-bol au fur et à mesure de ses humeurs très changeantes, souvent moroses, de ses amours toujours déçus, de ses cuites à répétition. J'ai bien aimé la petite note sur le jeune punk à l'arrêt de bus qui lit Cometbus avec un air un peu dédaigneux, et le sentiment exaspéré de Steve : "Je ne peux pas croire qu'on lise encore Cometbus"...
Le numéro 6 a été publié par Microcosm Publishing, une sorte d'asso promouvant la culture zine sur Portland.
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