01/12/2003

Quality Street #4 - décembre 2003


Barricata n°11, décembre 2003, 2.5 EUR
Ben ça alors, Barricata passe au grand format, à l’impression offset, et augmente de fait son tirage. Déchirant l’enveloppe kraft, surprise et déception m’envahissent tout d’abord. Je n’ai jamais vraiment aimé les fanzines qui « deviennent grands ». Lorsque, début 1990, l’un de mes premiers fanzines, The Gossip, passa de la photocopieuse à l’imprimerie, de la machine à écrire à la PAO, de quelques centaines d’exemplaires au millier (et bientôt 5.000), j’avais déjà éprouvé ce phénomène de rejet ; d’ailleurs j’y contribuai très peu, et seulement sous la contrainte des autres « gossipmen ». C’est exactement le même sentiment qui m’est revenu en découvrant ce Barricata #11, c’est comme çà, çà ne s’explique pas (si ça s’explique sûrement, mais à 75 € la séance d’une heure, je peux encore me passer de savoir pourquoi). L’imprimerie fabrique des produits identiques, en quantité infinie, tandis que le fanzine reste artisanal, au tirage forcément limité (cette limite étant la capacité mentale du fanzineur à accepter ces tâches abrutissantes que sont le pliage/découpage/agrafage). Oui mais voilà : Barricata fait partie de la «race» des gens qui font et non de ceux qui parlent et ne font rien (André Malraux, Espoir), alors on laissera ces considérations stériles au placard et on s’attardera longuement sur leur dossier « Pendant qu’on tue en Palestine » dont la citation introductive des Bérus n’est peut-être pas si anodine que cela puisque ce sont ces mêmes BxN que l’on retrouve un peu plus loin. Des BxN qui nous disent qu’ils n’ont pas grand chose à dire, que le buzz ils ne le comprennent pas vraiment, qu’ils pensaient juste faire un concert comme çà, parce que leur pote Brossard (programmenteur attitré des Trans) le leur a demandé. Innocents Bérus ? On se laisse aller à les croire sur parole. Papy Brossard est un filou, lui savait sûrement ce qu’il faisait : « passez donc faire un tour, comme en 86… », faire scintiller la flamme de la nostalgie, et comme Loran a justement la guitare qui le démange... Ces Bérus-là sont touchants de naïveté : « Là, j’apprends que ce sont les maisons de disques qui achètent les couv des magazines». Eh oui les gars, vous aurez droit à la couv de Rock & Folk malgré le fait que vous vouliez être sur celle de Punk Rawk… Marsu prend la suite, pour une itw qui viendra compléter celle de No Gov (cf. QS2) : « un concert des Bérus en 89 ça coûte combien ? », pas franchement utile, mais les historiens du rock apprécieront le moment voulu. Revenons à la Palestine : « 6 semaines sur une terre brûlée, récit fragmentaire ». Le précepte de base, celui qui déclenche ce franchissement de la Méditerranée est, en apparence, simple : « Parce que nous voulions juger par nous-mêmes. On ne délègue pas sa pensée sur un sujet aussi brûlant ». Positions bien discutables : pas besoin de mettre sa main au feu pour savoir que ça brûle… et que peut donner une immersion dans un état en guerre où tout mouvement est contrôlé, tout déplacement se doit d’être justifié ? Le début du récit irrite : une sorte de voyeurisme sourd de la prose, excitation mal cachée devant une société qui vit au rythme des fusils-mitrailleurs : tables de presse du Hamas, de la Djihad islamique, manifestation en armes d’une Brigade des Martyrs d’Al-Aqsa ? Oui, et alors ? Qu’est-ce ça change au sort des Palestiniens ? pensé-je… La citation de Malraux revient, lancinante… ceux qui parlent, qui regardent, ceux qui agissent… Mais de ce voyage, reviennent aussi deux interviews : l’une avec Michel Warschawski (A tombeau ouvert, éditions La Fabrique, 2003), l’autre avec Nassif, responsable d’une ONG à Ramallah. Finalement j’aurais aimé me contenter de cela, de ces témoignages des deux parties, celui d’un juif anti-sioniste, celui d’un palestinien de terrain, ceux de deux hommes qui œuvrent, de part et d’autre des murs et des barbelés, pour une improbable paix. Leurs propos sont simples, dénués d’artifices, essentiels. Le sensationnalisme du « M16 dans le dos » ne les affecte plus, il y a bien d’autres priorités. Eux agissent, les faire témoigner, c’est agir à leurs côtés. Merci pour cela, donc. Faire parler les étudiants, les paysans, les médecins, voilà le combat qu’aurait dû offrir plus largement Pâtre. Pas ce carnet de voyage teinté malgré tout de narcissisme. J’avoue que lire ensuite l’interview des Frelons ou des Apaches n’a pas été facile ; la futilité du rock’n roll ne m’ayant probablement jamais autant sauté aux yeux. D’ailleurs j’ai survolé. Pour en finir avec ce Barricata nouvelle formule, REFLEXes nous ramène alors sur la scène politique en évoquant les scènes musicales fascistes et néo-nazies en Europe. On s’abonne pour 10 EUR (3 n°). 11 chroniques zines.

Ceci m’amène tout naturellement à « Sur les terres du Rock Identitaire Français – Acte 2 » édité par Ras l’front. L’ex-gossipmen Matoo-Watoo, inventeur du multi-top chiottes en 1989 (cf. QS3 – à ce propos les Canadiens de Katalogue se demandent désormais qui est donc ce Matoo-Watoo qu’ils ne connaissent pas) me l’a fait parvenir en compagnie de ce superbe autocollant « Sauvez la démocratie, mangez un facho », détournement de l’ogre de Goya mais qui ,moi (nous), me ramène inévitablement aux délicieux Trisomie 21. Ce deuxième volume apparaît davantage comme un complément au précédent dossier qui reste lui indispensable, une mise à jour discographique et un « dictionnaire des citations ». L’ensemble est très descriptif (trop, à mon goût) et les dénonciations parfois tellement caricaturales qu’elles en deviennent inefficaces. Là encore, toute une série de bons conseils pour combattre le RIF, mais il eut été préférable, à mon humble avis, d’y ajouter une liste des actions effectivement menées sur le territoire. Parler de ce qui se fait est toujours plus efficace que de ce qui devrait se faire.

Kérosène n°2, automne 2003, A4, gratuit.
J’ai rencontré Dan de Kérosène l’été dernier à Montaigu. L’interview a été diffusée dans Sniffin’glue et retrace l’histoire du zine, des fondations nancéennes à l’exil montacutain. La nouvelle formule de Kéro, gratuite, séduit inexorablement. Et à chaque nouveau numéro un peu plus. L’ambiance graphique est celle que l’on connaît dans les zines américains, de Maximum RnR à Copper Press.Dans le n°2, les feu-Second Rate et Seven Hate sont à l’honneur. Itw bilans avec cette once de nostalgie qui pointe déjà avant même le round final. 1000 travels of Jawaharlal a trouvé un nom qui fait qu’on s’intéresse forcément à eux, bien joué. Le désinCarné Brotherfab évoque cette nouvelle réinCarnation stoner qu’est Caldera, une histoire de famille nous avoue-t-il d’emblée, mais cela n’empêche pas les questions cinglantes.
Pour rester en famille (celle, élargie, du metal), je signale la sortie « irminente » du bouquin de Fabien Hein : Hard rock, heavy metal, metal. Histoire, cultures et pratiquants. 320 pages qui tuent, Ozzy en est encore tout retourné (fallait pas le lire en faisant du quad). Je n’en dis pas plus, toujours une question de déontologie… ou de doigts dans la prise ?

Baywatch Korps n°1, 2003
Chose promise : Baywatch Korps. Un zine HxC (dans l’âme si ce n’est dans les groupes présentés) totalement allumé (pléonasme ?) dans la lignée de Trash d’encre ou de Massacre (et ce n’est pas vraiment un hasard, mais cela ne nous regarde pas). Du A5 bien roots, colle et ciseaux. Une nouvelle porno où l’on retrouve la désormais célèbre Sabrina (QS3), une itw de Bruce Campbell (Evil Dead) tout juste découpée dans TéléCinéObs. Bref du shit zine de pro (10 ans d’expérience, c’est comme le Nutella).



Daily Misquamacus n°9, 2003
DM m’a été ramené par G. (from GBH+support) de passage à Clermont. Un A5 bilingue metal punk-oi! avec des mini-posters A4 au centre (photos de concert) : un OK podium! pour skinhead en quelque sorte. Mais comme le type qui prend les photos doit être à peu près aussi grand que moi, on voit plus les crânes luisants des mecs devant lui que les groupes sur scène… Enfin, on y trouve une dizaine d'itw la plupart malheureusement réalisées par correspondance, me semble-t-il : The Warriors se contente de répondre par oui ou par non à des questions pourtant loin d’être inintéressantes (fallait pas les inviter), Litham groupe metal algérien ne pipera mot sur Bouteflika (on ne sait jamais), GBH rappelle à qui l’aurait oublié qu’il est un groupe punk. A propos de GBH (et pour ne plus en finir avec le copinage, et encore, là, on fleurte même avec l'auto-promotion), la tournée « GBH+support » qui démarre en janvier est celle d’imposteurs, n’hésitez pas à leur envoyer quelques tessons de bouteille au passage (et visez donc en priorité le grand à lunettes).

Funk-U n°8, fevrier 2002, 35 Francs
Funk-U sortait en 2002 son huitième et dernier numéro. Superbe zine style Abus Dangereux (avec CD donc) édité par le Mothership Funk Club de Paris, une asso avec à sa tête un troupeau de funkateers dont Blaise Wonder B, un vrai malade qui possède plus de 12 000 disques de funk. Impossible aujourd’hui de mettre la main sur un quelconque site web de cette asso (mais allez jeter un œil sur wegofunk.com, « l’univers des musiques afrogrooves », ou fonkadelica.com, ça déchire pas mal (faut monter le son) – ce dernier ayant toutefois vendu son âme à la fnac, on évitera de s’attarder trop longtemps car ça pop-up dans tous les coins). Funk-U avait mis Bigg Robb (Zapp) en couv, black bibendum ayant probablement tourné dans le «Fat» de Weird Al Yankovic. Le récit d’une renaissance, ou plutôt d’une nécessité d’aller de l’avant après le décès de Roger Troutman (l’une des inépuisables banques de données seventies pillées par les rappeurs US), abattu par son frère au sortir d’un session studio en 1999. Les clefs du succès du funk ? tout simple : « Le funk, c’est comme des macaronis au fromage, des hamburgers et de la pizza. Les gens aiment çà. En plus, le funk n’a pas d’effets négatifs ». Ben si quand même : ça fait grossir, man !

Excit n°4, été 2003, 2,5 EUR
Excit est basé en Vendée, des enfants de Rabbits, peut-être ? Vu de loin, ce prozine me rappelle Magic Mushroom du temps de sa splendeur, mais c’est sûrement dû à ce sous-titre : « indie support music » qui m’évoque irrémédiablement chemises à fleurs ou à pois (Floride), jeans gazelles, coupe au bol cheveux tombant pile-poil sur les yeux (super pénible), converse qui dégagent : the shoegazer style, en somme. Ouais, sauf que pour le baggy-sound faudra repasser (et, désormais, je ne vais pas m’en plaindre) : Cheval de Frise et Room 204 valent mieux que North Side et les Charlatans. L'indie music, ce n'est plus de l'indie pop, faudra s'y faire. Sanjam records livre clefs en main la façon de monter un label indé (merci), mais comme il tape dans l’emo, j’ai envie de trancher dans le vif (on sauvera quand même le split Second Rate/Flying donuts), ouais mais voilà, ils sont quand même nantais. Alors attendons encore un peu, le linge sale vous savez…

Les contacts:
Barricata c/o Crash disques 21 ter rue Voltaire 75011 Paris rashparis@hotmail.com
Baywatch Korps Simon Vandenplanque résidence Cèdre bleu appt 11 45B avenue de Lattre de Tassigny 59190 Hazebrouck
Daily Misquamacus pas de contact
Excit 19 bis rue du moulin 85390 Cheffois excit@free.fr
Funk-U 37 rue Claude Tillier 75012 Paris bsmprod@free.fr
Ras l'front BP 87 75561 Paris cedex 12
Kerosène 16 rue de l'égault 85600 Montaigu kerosenefanzine@wanadoo.fr
Abus dangereux BP15 33031 Bordeaux cedex abus@viciouscircle.fr
Copper Press - Maximum RnR -
The Gossip

Quality Street ne fait pas grossir les femmes enceintes.